jeudi 5 novembre 2009

report conférence sur les algues vertes (par JP Letourneur)

Vendredi 30 Novembre 2009 a eu lieu, à l‘initiative de l’ADSLB*, salle de l’arbre de l’abbaye de St-Jacut de la mer, une conférence-débat sur le problème “émergent” de l’algue verte. Elle était animée par le Dr. Claude Lesné, médecin, ingénieur attaché de recherche au CNRS sur les... polluants atmosphériques, et actuellement au département de santé publique de l’université de Rennes I. La conférence, devant un auditoire hétéroclite d’environ 100 personnes, s’est déroulée en deux parties.


Dans un premier temps, le Dr Lesné a fait un rappel des connaissances actuelles de la fonction respiratoire humaine et notamment de sa complexité et de sa fragilité, surtout vis-à-vis des polluants et toxiques gazeux, à fortiori lors des efforts physiques qui décuplent le volume d’échanges respiratoires (liberté totale de passage dans les bronches, bronchioles, etc… jusqu’aux alvéoles pulmonaires, centres névralgiques de l’échange O2/CO2). L’accent a donc été mis sur la surexposition des poumons des enfants en bas âge dont l’appareil respiratoire n’arrive à totale maturation qu’autour de 10 ans !...et des poumons en hyperventilation des sportifs. La seconde partie de l’exposé a fait un rappel et un bilan des différents cas d’ « intoxication » recensés ces dernières années, à partir du cas de ce cavalier réanimé in extremis et de son cheval décédé en quelques minutes le 28 juillet dernier à St- Michel en grèves, mais aussi la mort brutale de deux « gros chiens » à Hillion (22) en 2008, celle d’un joggeur de 27 ans en 1989 au même endroit que le cheval mort, et le décès suspect récent d’un ramasseur d’algues…

Les études épidémiologiques poussées, accélérées par la survenue de ces cas mortels largement relatés par les médias ont révélé la grande toxicité de l’H2S, ou sulfure dihydrogéné, principale émanation des algues vertes en putréfaction, et dont on peut mesurer la concentration dans l’air. L’H2S est malodorant type « œuf pourri » à partir de 2 ppm, toxique ( œil, nerf olfactif et cerveau) à partir de 150 ppm, inodore et mortel en quelques minutes par asphyxie à partir de 500 ppm). Ce gaz est bien connu des services de santé publique et de multiples cas d’intoxication mortelle ont été décrits dans les fosses à lisier. Si d’autres gaz ( méthane, NO2,…) se dégagent des algues vertes en décomposition, le H2S apparaît le plus toxique et dangereux à des concentrations souvent retrouvées au voisinage des zones les plus fournies en algues décomposées (aspect blanchâtre crouteux des amas d’algues). Si ce phénomène de dépôt des ulves ou algues vertes est connu depuis des décennies, surtout en Bretagne, il semble s’être accentué nettement depuis la fin des années 80 au point d’engager des mesures de ramassage dont les coûts « municipaux » deviennent exorbitants ( 70000 tonnes en 2004, 10 euros/tonne)!

La relation entre cette prolifération et la surproduction agricole à coups d’engrais est établie par sa survenue le plus souvent au printemps et en été ( périodes des plus fortes concentrations de nitrates des eaux de rivière), associée à une augmentation du taux de nitrates moyen des rivières passant de 10 à 36 mg/l en 20 ans, parallèlement à la constatation d’une augmentation des surfaces de dépôt sur le littoral (survol aérien) et de la quantité de tonnes d’algues ramassées (source : Prolittoral). A noter que la norme Européenne en matière de nitrate est de 25 mg/l mais en France de 50 mg/l, alors que le coût de l’eau y a été multiplié par 2 voire 3 en 10 ans !

Malgré les mesures déclenchées par les pouvoirs publics pour satisfaire à ces normes, la stabilité du taux de nitrate toujours trop fort autour de 32mg/l, les coûts importants liés aux ramassages par les communes, la pollution visuelle et olfactive du littoral breton avec ses conséquences sur l’économie touristique, et surtout le danger sanitaire d’intoxication mortelle, des recours en justice ont donc été tout récemment intentés depuis 2007 par diverses associations environnementales.

en Bretagne, on a des rochers verts. Attention danger!!!

Reste à savoir comment l’état va pouvoir se sortir de ce dilemme avec d’un côté sa mise en accusation d’insuffisance vis-à-vis des normes européennes et sa responsabilité engagée dans la survenue de cas mortels d’intoxication (sous-estimation du risque), et de l’autre la nécessité d’une politique agricole assainie et contrôlée à imposer à un monde agricole déjà vascillant, notamment en Bretagne où sur 6% de la surface nationale sont concentrés 50% de la production de porcs et de poulets et 25% de la production laitière !

Dans ce combat de longue haleine, les plaintes multiples et recours sont-ils la solution unique pour tenter de résoudre ce problème ou risquent-ils de polariser l’argent et l’énergie sur la seule notion de responsabilité au lieu de chercher ensemble les solutions ?

Autrement dit, si l’information est indispensable à la réflexion, l’action d’indemnisation est un droit mais l’action de protection (de la nature et de l’homme) est un devoir.

En attendant, amis surfeurs, fuyez et signalez les tas d’algues vertes putréfiées (aspect de croûte blanche des plages et des vasières et estuaires), informez autour de vous du danger majoré pour les enfants, insuffisants respiratoires et les sportifs, et si vous avez un jardin ou..des plantes vertes, vous savez quoi faire… !

JPLetourneur

Ps : les algues dans l’eau ou fraîchement déposées ne présentent pas de danger ! Source : Bastamag.net

* Association de Défense du Site de Lancieux et de la Baie de Beaussais

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